Un système de production économiquement viable et durable pour l'environnement
Pascal Folleville fait évoluer, depuis 2012, son exploitation agricole vers un système économiquement viable et durable pour l’environnement. Il élève 150 génisses laitières sur 40 ha de prairies et cultive 60 ha de grandes cultures en agriculture de conservation des sols dans le Morbihan (56), sur le bassin de l’Yvel Hyvet. Il est accompagné par le syndicat mixte du grand bassin versant de l’Oust qui encourage, avec l'aide financière de l'agence de l'eau Loire-Bretagne, les pratiques agricoles favorables pour préserver la qualité des eaux. Il témoigne...
Une évolution vers l’agriculture de conservation des sols
Pascal Folleville
© Agence de l'eau Loire-Bretagne
Suite à la scission d’un groupement d'exploitation agricole en commun (Gaec) laitier en 2012, j’ai réorienté mon exploitation sur l’élevage de génisses laitières. Chaque année, j’élève 150 génisses que je rends en animal prêt-à-vêlé à quatre éleveurs laitiers voisins. L’alimentation est uniquement basée sur 40 hectares en prairie, par pâturage estival, en foin sec ou en enrubannage.
Je cultive par ailleurs 60 ha de cultures en agriculture de conservation des sols. Ma motivation pour l’arrêt du travail du sol a été l’amélioration des sols. Aujourd’hui la « nature reprend ses droits ». Les couverts poussent naturellement : je retrouve dans les couverts des espèces que je n’ai pas semées l’année en cours. Avec les couverts, une biomasse énorme revient au sol pour le nourrir.
Je ne cultive plus de maïs, qui est une culture stressante : la marge est peu intéressante et l'enjeu sur la réussite du désherbage est fort.
Je sème les céréales dans de la luzerne, qui repousse après la récolte des céréales, et que je fais pâturer avant le semis suivant. Je sème mes colza très précocement fin juillet en association avec un mélange tournesol / vesce / féverole / phacélie. Je cultive de la féverole et de l’avoine en culture associée avec de la vesce. En fonction des années, certaines cultures comme le pois ne reçoivent aucun traitement. Mon système est plus cohérent vis-à-vis de l’environnement
Sur une année entière j'ai réussi à me passer totalement d'insecticides, de fongicides, de molluscicides, de régulateur de croissance, de traitement de semences. Seul, le glyphosate, que j'utilise à 1/5ème de la dose homologuée m'est indispensable. Son interdiction, sans aucune solution équivalente, remettrai tout l'ensemble de mon système en question. J’expérimente tout de même des techniques alternatives comme le compostage de surface des couverts avec un travail mécanique superficiel. Depuis longtemps, je ne fais plus de traitement aux abords des habitations, je fais du sarrasin ou je laisse en prairies fauchées.
Un choix aussi économique
Semis direct sous couvert
© Sophie Moisan
Pour améliorer ma marge, soit je vise un rendement supérieur, soit je limite mes charges.
J’ai choisi la deuxième option en choisissant d’implanter à pas cher. J’utilise essentiellement des semences de ferme. J’ai arrêté de travailler le sol sur l’ensemble de l’exploitation. Les semis sont réalisés avec un semoir de semis direct acheté en commun à trois.
Mon parc matériel de culture est réduit uniquement à ce semoir, ce qui me permet d'économiser plus de 2 500 litres de carburant à l'année comparé à un système avec travail de sol. Le rouleau packer que j’utilise pour niveler le sol et rouler les couverts, est en coopérative d'utilisation de matériel agricole (CUMA). Je constate également un gain sur le temps de travail. Je fais tout tout seul, avec uniquement la récolte à façon.
Expérimenter c’est mon plaisir !
J’ai commencé sans connaître toutes les facettes de l’agriculture de conservation des sols. J’ai participé à un groupe d’échanges sur le travail du sol qui réunit agriculteurs bio et non bio. La réflexion de groupe m’a conforté dans mes pratiques et m’a incité à continuer. Je n’étais pas dans le faux.
La réalisation du diagnostic DPR2 est venue des échanges avec l’animatrice agricole du syndicat mixte du grand bassin de l’Oust. Le diagnostic a accompagné une réflexion déjà initiée autour de l'aménagement de haies. Il m’a incité à m’engager dans des mesures agro-environnementales « bocages » et « gestion des milieux humides ». Ces mesures ont permis de valoriser les bonnes pratiques déjà existantes, comme notamment le maintien des prairies en bord de cours d’eau.
Actuellement, je suis engagé dans une mesure agro-environnementale pour la conversion au semis direct sous couvert depuis trois ans.
Diagnostic des parcelles à risque de transfert DPR2
Objectif : proposer un programme d’aménagement des parcelles et des pratiques pour limiter le risque de transferts des polluants vers les eaux (produits phytosanitaires, phosphore, bactéries fécales, matière organique dissoute).
Le diagnostic DPR2 est une démarche régionale initiée par les chambres d’agriculture de Bretagne et les partenaires scientifiques.
Je suis satisfait de ce que je fais !
Je ne sais pas qui me succédera, mais je serais satisfait s’il retrouve un sol identique à ce que j’ai trouvé lors de mon installation en 1993. Avec les pratiques d’agriculture de conservation des sols, mon sol a retrouvé une meilleure fertilité.
Sophie Moisan
© Agence de l'eau Loire-Bretagne
« D’une manière générale, je ressens que les agriculteurs ont un besoin de reconnaissance des actions déjà mises en place en faveur de l’environnement. Il est nécessaire de développer la communication vers le grand public. Le contexte économique actuel ne favorise pas certaines prises de risque pour faire évoluer les pratiques. »
Sophie MOISAN, animatrice agricole sur le bassin versant Yvel Hyvet pour le syndicat mixte du grand bassin de l’Oust
Le syndicat mixte du grand bassin de l'Oust
Pour améliorer la qualité des eaux, son programme d'actions combine changements de pratiques agricoles et aménagement du bassin versant. Par exemple, le syndicat mixte du grand bassin de l'Oust est porteur du programme Breizh bocage. Celui-ci vise à créer des aménagements bocagers (talus planté, talus nu ou haie à plat), dans le but principal de réduire les transferts de polluants d’origine agricole vers les eaux superficielles. Les projets de plantations sont parfois freinés par l’absence d’accord des propriétaires ou bien par leur entretien futur.