Changer ses pratiques agricoles pour économiser et valoriser l'eau
La chambre d'agriculture des Deux-Sèvres gère quantitativement la ressource en eau avec l'appui de la coopérative de l'eau. Celle-ci porte le projet de création de 16 réserves de substitution pour stocker près de 7 millions de m3 d’eau dans le cadre du contrat territorial de gestion quantitative Sèvre Niortaise-Mignon. Dans le bassin versant de la Courance et du Mignon, Denis Mousseau, céréalier sur 266 ha, dont 60 en agriculture biologique, est engagé dans cette coopérative. Suite à une réflexion collective pour assurer le partage de l'eau, il modifie ses pratiques agricoles. Témoignage...
Gérer la quantité d’eau disponible
Denis Mousseau
juillet 2019
© Thomas Viloingt - Agence de l'eau Loire-Bretagne
" Depuis 2003, les épisodes de sécheresse se sont succédés et j'ai dû souvent, comme tous les agriculteurs, faire face à des restrictions et à des interdictions d’irrigation. Pour mon exploitation de céréales, stocker l’eau l'hiver pour la réutiliser en période de sécheresse était indispensable pour garantir ma production et mon revenu. Aussi, j'ai participé bien volontiers à la réflexion mise en place avec l’ensemble des irrigants pour mieux gérer et partager l'eau.
Valoriser au mieux l’eau disponible
Dans les années 2000, je bénéficiais de 151 000 m3 de droit d’eau. En 2010, j'ai saisi l’opportunité d'une aide financière pour m'engager dans une mesure agro-environnementale « désirrigation ». Il s'agissait de réduire le volume d’eau à 60 000 m3, dans l’objectif de sécuriser ce volume par du stockage hivernal.
J'ai choisi d'abandonner un forage situé à 12 km du site d’exploitation qui permettait d’irriguer 35 hectares de maïs. En 2017, au départ de mon associé, j'ai arrêté l’élevage laitier et j'ai engagé une réflexion plus profonde sur le changement de mon système de production. 18 mois plus tard, j'ai converti 60 ha en agriculture biologique autour du siège de l’exploitation.
Pour lutter efficacement contre les adventices, l’allongement des rotations par l’introduction de luzerne et de cultures de printemps, dont des légumes de plein champ, s’est avéré indispensable. Ces cultures ont besoin d'être irriguées pour atteindre un rendement suffisant et garantir la viabilité économique de mon exploitation. J'ai choisi de n’irriguer que ces cultures.
S'engager pour la qualité de l’eau
Avec d’autres agriculteurs, j'ai mis en place des bandes enherbées, des couverts d’inter-culture et des haies, en plus de la conversion à l’agriculture biologique. Volontairement, je n’irrigue plus entre 9 heures et 19 heures ce qui limite les pertes d’eau par évaporation. Grâce à la réflexion collective engagée, c'est maintenant le cas de 95 % des agriculteurs du territoire.
Des engagements individuels et collectifs en faveur de la qualité de l’eau et de sa bonne gestion
La démarche de Denis Mousseau s’inscrit dans celle du protocole d’accord pour le contrat territorial de gestion quantitative (CTGQ) Sèvre Niortaise-Mignon signé en décembre 2018.
Chaque agriculteur prend des engagements obligatoires, comme le diagnostic d’exploitation, ainsi que des engagements pour réduire l'utilisation des phytosanitaires, pour aller vers des pratiques culturales plus respectueuses de l'eau et pour préserver la biodiversité.
Vers de nouveaux investissements
J'attends avec impatience, la construction et la mise en service des réserves de substitution pour disposer du volume d'eau indispensable à mes cultures.
Avec la garantie d'avoir 60 000 m3 d'eau grâce au stockage, j'envisage d'investir dans du matériel d’irrigation plus performant : goutte-à-goutte, rampe… Je souhaite, avec ma compagne, proposer une offre locale. Pour cela, nous souhaitons monter un atelier de volailles en agriculture biologique. Il nous permettra de mieux gérer la fertilisation des cultures et d'être autonome en utilisant les matières organiques issues de l'élevage comme fertilisant de nos cultures."
Julien Moureau
juillet 2019
© Thomas Viloingt
"Le dialogue, engagé dans le cadre du CTGQ Sèvre Niortaise-Mignon, a permis à chacun de mieux comprendre les attentes des autres pour trouver le meilleur compromis. Le protocole ainsi obtenu en 2018 prévoit des engagements individuels. Une aide de l’agence de l’eau Loire-Bretagne de plus de 28 millions d’euros est prévue pour la création des 16 réserves de substitution permettant de stocker 7 millions de m3 d'eau. »
Julien Moureau, conseiller à la chambre d'agriculture des Deux-Sèvres