Production d’énergie renouvelable dans les stations de traitement des eaux usées urbaines

La valorisation de la chaleur fatale issue des stations d’épuration offre un potentiel énergétique encore peu exploité. Face aux objectifs de neutralité énergétique fixés par la directive européenne Eaux Résiduaires Urbaines, cette solution représente une opportunité concrète pour les collectivités. Exemple inspirant à Orléans, où récupération thermique et transition écologique avancent main dans la main.

Valorisation de la chaleur fatale : un potentiel sous-exploité

La récupération de chaleur fatale sur les process de production qui émettent de la chaleur est une technologie mal connue. Pourtant, elle peut concerner de nombreux acteurs de l’industrie mais également les collectivités. La valorisation énergétique des stations de traitement des eaux usées est un thème d’actualité. La directive européenne Eaux Résiduaires Urbaines impose la neutralité énergétique des stations de traitement des eaux usées ≥ 10 000 EH à l’échelle nationale d’ici à 2045. Elle entre également dans les stratégies d’accompagnement de l’ADEME via le dispositif du Fonds chaleur.

Récupérer la chaleur perdue

La valorisation énergétique des stations de traitement permet de produire de la chaleur (ou du froid) et de l’électricité. L’utilisation des boues de traitement par exemple pour la production de biogaz est un procédé bien connu. La récupération de chaleur fatale pour la production de chaleur ou d’eau chaude sanitaire (ECS) et, dans certains cas pour la production d’électricité, est une technologie qui l’est moins. 

De quoi s’agit-il ? De récupérer la chaleur générée par le fonctionnement d’un procédé et qui n’est pas utilisée. Cette chaleur, appelée chaleur fatale, peut prendre plusieurs formes : des rejets gazeux, liquides ou diffus. À ce titre, les sites industriels, les raffineries, les hôpitaux, les usines d’incinération et les stations d’épuration sont également concernés. La moitié du gisement de chaleur fatale se situe dans les industries chimiques et agroalimentaires (source ADEME).
 

Valoriser la chaleur fatale des stations de traitement

Les collectivités, quant à elles, peuvent récupérer la chaleur sur les stations de traitement.

Astrid CARDONA MAESTRO, ingénieure Fonds chaleur géothermie du Service chaleur renouvelable de l’ADEME indique :

« La valorisation de l’énergie fatale représente un gisement important. Il y a une méconnaissance de ce type de solution. Pourtant, pour les stations d’épuration proches des milieux urbains, c’est une technologie intéressante pour alimenter des réseaux de chaleur par exemple. Dans les stations, les niveaux de températures sont stables tout au long de l’année. C’est idéal pour alimenter des pompes à chaleur ».

La chaleur récupérée peut être utilisée pour les besoins propres du site, ou pour répondre à des besoins de chaleur ou de froid d’autres sites ou bâtiments. Voire pour alimenter un réseau de chaleur d’une ville par exemple.

Comment ? Par l’installation d’un échangeur thermique et d’une pompe à chaleur haute performance soit sur des eaux usées en réseaux d’assainissement, soit en sortie de station sur des eaux traitées mais dont la température sera plus faible.
 

Une station de traitement doublement vertueuse à Orléans la Source

La station de traitement d’Orléans la Source (90 000 EH) est un bel exemple de récupération de chaleur fatale. La chaleur des eaux usées en sortie de station, avant qu’elles ne soient rejetées, est récupérée. Leur température oscille alors entre 13 et 20 °C selon la température extérieure. 

Robin Durant, Adjoint au directeur général à la Société publique locale Orléans Energies indique :

« La station est située en aval d'un réseau séparatif eaux usées/eaux pluviales, ce qui permet le maintien de la température en entrée toute l’année en évitant les interférences liées aux pluies. La récupération permet de baisser la température de rejet de 5 à 7 °C ce qui est intéressant pour le milieu récepteur ». 

Echangeur thermique platulaire associé à une pompe à chaleur haute performance

Echangeur thermique platulaire associé à une pompe à chaleur haute performance

© Orléans Métropole - Didier Depoorter

La chaleur est récupérée via un échangeur thermique platulaire associé à une pompe à chaleur haute performance. Elle est ensuite injectée dans le réseau de chaleur public. Celui-ci a été étendu sur 3 km dans le cadre de projet, afin de chauffer environ 400 logements sur la commune d’Olivet, un bâtiment de l’université des sciences et les locaux de la présidence de l’université d’Orléans.

Robin Durant précise :

« Quand nous avons monté le projet, nous n’avions pas de modèle clé en main. Nous voulions une installation efficace, tout en étant très robuste, en évitant les risques d’encrassement du système liés à l'utilisation des eaux usées. Aujourd’hui l’installation fonctionne avec peu d'interventions de maintenance pour la pompe et l’échangeur. Notre retour d’expérience est très bon. Nous recevons 3 à 4 sollicitations par mois de collectivités qui souhaitent visiter l’installation et envisagent un projet similaire. Nous servons en quelque sorte de démonstrateur. De plus notre coefficient de performance global sur l’ensemble de l’installation est élevé, avec un COP supérieur à 3, ce qui veut dire que nous consommons moins d'1 kWh d'électricité pour fabriquer 3 kWh de chaleur ».

1,9 million financé dans le cadre du fonds chaleur de l’ADEME

Cet apport en chaleur permet à la fois de réduire la facture énergétique et les émissions de gaz à effet de serre. Le réseau est en effet alimenté à 60 % par la biomasse et à 40 % par le gaz naturel. Avec la récupération de la chaleur fatale des eaux usées, la consommation de gaz est réduite de 4 100 MWh par an. Les travaux ont été menés en 9 mois. L’investissement est de 5,2 millions d’euros dont 1,9 million financé dans le cadre du fonds chaleur de l’ADEME. 

Par ailleurs, depuis 2023, la station est équipée d’une unité de Réutilisation des Eaux Usées Traitées (REUT). 100 000 m3  d’eaux usées sont ainsi traités par an et sont destinées à l’arrosage du parc floral. Autant de m3 qui ne sont plus prélevés dans la rivière le Loiret.

Différentes possibilités techniques

Différentes technologies existent sur le marché. C’est notamment la température de la chaleur fatale qui va déterminer la stratégie de valorisation. L’étude de faisabilité permet de définir la meilleure solution en fonction de différents paramètres comme les besoins thermiques à satisfaire (chaud et/ou froid), le débit de la station, la température moyenne des eaux usées, etc. 

Astrid CARDONA MAESTRO précise :

« L’étude de faisabilité va permettre de conclure sur l’opportunité d’une valorisation énergétique en coût global, économique et environnemental, et détermine un seuil de rentabilité minimum ».

L’ADEME via le Fonds chaleur peut financer les projets jusqu’à 70 % pour l’étude de faisabilité et 60 % pour l’installation.
 

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