Effacement du barrage du Gué Giraud pour restaurer la Glane à Saint-Junien
Lauréat des Trophées de l’eau Loire-Bretagne 2019 dans la catégorie « Préservation des milieux aquatiques et de la biodiversité », le syndicat d’aménagement du bassin de la Vienne (SABV) s’est distingué par son action de restauration de la continuité écologique sur la Glane en supprimant le barrage du Gué Giraud à Saint-Junien dans la Haute-Vienne (87).
Le barrage du Gué Giraud, un barrage vieillissant
Dans les années 1950, la ville de Saint-Junien construit un barrage de 6 mètres de hauteur et 36 mètres de longueur sur la rivière Glane, affluent de la Vienne, pour y puiser l’eau destinée à alimenter la ville en eau potable. Au fil de son exploitation, cette retenue de 77 000 m3 s’envase jusqu’à accueillir plus de 85 % de sédiments en 2011, une île s’y est même formée.
En 2008, face à un souci de pompage et à la présence de cyanobactéries, le conseil municipal décide de raccorder Saint-Junien à la ville de Limoges pour l’approvisionnement en eau potable (42 km de conduite). L’exploitation du site au barrage de Gué Giraud est abandonnée.
Sans usage du barrage, les élus décident de le supprimer en 2013. Une décision qui ouvrait de nouvelles perspectives pour le site : retrouver le cours originel de la Glane et une meilleure qualité chimique et écologique de la rivière.
Les travaux de déconstruction du barrage : un chantier d’envergure
Cette action s’inscrit dans un contrat territorial milieux aquatiques. Les travaux du Gué Giraud débutent dès 2014 par un abaissement du plan d'eau de 3,5 ha. Entre 2014 et 2016, les études et démarches administratives à mener avant un tel chantier sont réalisées. Les travaux se déroulent entre mai et décembre 2017 et des ajustements sont réalisés au printemps 2018. L'inauguration du site a lieu le 11 janvier 2019.
Yoann Brizard
directeur du SABV
© SABV
Yoann Brizard, directeur du syndicat d’aménagement du bassin de la Vienne
« L'opération a été conduite en plusieurs phases et a utilisé une technique de découpe du béton du barrage au fil diamant, innovante pour ce type de chantier. »
Les premières étapes ont consisté à accéder au barrage et au lit mineur ancien de la glane. Pour cela une piste digue a été réalisée. Une rivière de dérivation a été construite pour pouvoir isoler la zone de chantier et la mettre à sec.
La découpe du béton du barrage et le curage des sédiments pouvaient alors avancer sans risque de pollutions des eaux de la rivière. Les 20.000 m3 de sédiments curés (plus de 5 piscines olympiques) du lit restauré ont été répartis sur la rive gauche du nouveau lit de la Glane, dans l’emprise du lac formé auparavant par le barrage. Pour finir, les cheminements sont consolidés avec les blocs bétons du barrage qui ont été concassés, puis les berges sont restaurées au moyen de techniques végétales. Enfin, la dérivation est supprimée pour laisser la Glane réinvestir son nouveau lit.
Ce gros chantier a mobilisé six entreprises, deux bureaux d'étude et de contrôle ainsi que trois associations.
Le coût global des travaux s’élève à 1,5 millions d’euros, dont 80 % financé par l’agence de l’eau Loire-Bretagne et 20 % par la région Nouvelle-Aquitaine. Ces travaux ont permis de rétablir la continuité et les fonctionnalités du cours d'eau, dans une optique de retour à un état sauvage et naturel. 400 mètres de lit naturel ont été recréés dans l'emprise de l'ancienne retenue et à l'aval. La mise en place d'outils pédagogiques, visites, film et site internet dédié, a accompagné la démarche pour faciliter la bonne appropriation du projet par la population locale.
Philippe Barry
président du SABV
© SABV
Philippe Barry, président du syndicat d’aménagement du bassin de la Vienne
« Le choix de la déconstruction nécessitait de prendre un certain nombre de précautions aux vues de l’ampleur des travaux à mener. Il fallait à la fois étudier les conditions techniques ayant le plus faible impact écologique sur la rivière et expliquer l’objectif de ces travaux et de ces importantes modifications du paysage local aux habitants. »
Le site du Gué Giraud aujourd’hui : quels résultats ?
Un an après la fin de travaux, la nature a repris ses droits. La Glane a retrouvé un cours naturel proche de celui d’origine. Ces travaux permettent la réouverture de la Glane à la migration des poissons.
Des suivis de pêches électriques ont été réalisés avant et pendant le chantier. Ces suivis se poursuivent pour mesurer les évolutions. Le retour de certaines espèces patrimoniales comme la truite fario, la loutre d’Europe ou le cingle plongeur ou encore la lamproie est attendu.
Le succès de ce chantier réside aussi dans l'appropriation des travaux et du site par la population locale. Le nombre de visiteurs pendant et après les travaux a augmenté. Il est prévu d’ailleurs prochainement la réalisation d’un sentier d’interprétation pour valoriser l’ensemble du patrimoine de ce site : historique, culturel, naturel et paysager.
Plus largement, le syndicat œuvre pour la reconquête de l’ensemble du bassin de la Glane
Cette déconstruction de barrage s'intègre dans un programme de travaux sur 25 sites pour reconquérir la continuité écologique du bassin de la Glane.
Des opérations d’appel à projets sont engagées pour des travaux sur les étangs de tête de bassin. Ils viennent compléter les actions d’amélioration de l’hydromorphologie et d’hydrologie.
Samuel André
chargé d’intervention, délégation Poitou-Limousin de l'agence de l'eau
© Agence de l'eau Loire-Bretagne
Samuel André, chargé d’intervention spécialisé milieux aquatiques, délégation Poitou-Limousin de l’agence de l’eau de l’eau Loire-Bretagne
« Cette opération est exemplaire en terme de réalisation (technique mise en œuvre, gestion de sédiments…) et de résultats. L'effacement a permis à la Glane de retrouver un cours naturel conforme aux cartes postales anciennes et a permis la réouverture de l'axe Glane à la migration. »
L’effacement du barrage du Gué Giraud sur la Glane - Saint-Junien (87)
Vidéo - L’effacement du barrage du Gué Giraud sur la Glane - Saint-Junien (87)
octobre 2019
© Agence de l'eau Loire-bretagne / Une image à part