Se convertir à l'agriculture biologique pour limiter les pollutions
Romain PERRINEAU, céréalier, entreprend de convertir en agriculture biologique une partie de son exploitation située en Eure-et-Loir. Installé depuis 2008 en grandes cultures, à Yèvres sur le bassin versant de l’Ozanne, il exploite 52 hectares en individuel et participe aux travaux agricoles sur une autre structure familiale. Les parcelles en limon battant hydromorphe ne sont pas irriguées et sont entièrement drainées. Il raconte son parcours...
Limiter l’usage des produits phytosanitaires et assurer une durabilité du système agricole
Romain Perrineau
Dans un champ de triticale
© Thomas Viloingt - Agence de l'eau Loire-Bretagne
"Sur mon exploitation, j'ai longtemps basé, la rotation type sur une succession colza / blé tendre / orge d’hiver. Même si performante économiquement et permettant de rationnaliser l'organisation du travail, elle a engendré l’apparition de résistances aux herbicides utilisés.
Comme je suis sensibilisé aux questions environnementales, je voulais éviter d’augmenter encore les doses d’herbicides et d'arriver à de vraies impasses techniques. Par ailleurs les animations, organisées sur le bassin versant de l'Ozanne par la chambre d'agriculture, m'ont permis de mieux appréhender les risques de pollutions diffuses liés à ces systèmes. Ma préoccupation était de tenter un changement de système qui serait plus durable, tant au niveau économique que technique et réglementaire. C'est ainsi que j'ai décidé de convertir mon exploitation de 52 hectares en agriculture biologique.
Cette décision a pris du temps car ce choix n'était pas partagé au départ et j'ai dû faire face à une réticence au niveau familial. L'absence d’exploitation en agriculture biologique aux alentours n'aide pas à convaincre et à rassurer sur la faisabilité d'une conversion. Pour y parvenir, je me suis inspiré des essais du lycée de la Saussaye dans lequel j'enseigne, et j'ai réalisé une étude de faisabilité économique approfondie.
Investir dans des agroéquipements
Après un diagnostic d’exploitation réalisé par la coopérative Axéréal dans le cadre du contrat territorial de l’Ozanne, j'ai entrepris de convertir progressivement des surfaces cultivées en agriculture biologique. Pour cette conversion j'ai eu recours à des leviers agronomiques :
- mise en place de cultures associées (triticale-fénugrec),
- introduction de légumineuses (féverole) et,
- désherbage mécanique.
L’absence d'irrigation et de contrat avant récolte a freiné les initiatives pour cultiver des plantes de printemps ou d'été à bonne valeur ajoutée (légumes, portes-graines, plantes à parfum aromatiques et médicinales...). Pour désherber les cultures, j'ai investi dans une herse étrille, une houe rotative et un autoguidage tracteur. Je suis en train de finaliser l’achat d’une bineuse.
Houe rotative
© Thomas Viloingt - Agence de l'eau Loire-Bretagne
J'ai bénéficié d'une aide de 50 000 € euros dont 50% de l’agence de l’eau Loire-Bretagne. Elle m'a été attribuée dans le cadre du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations. Cela m'a permis d’investir dans un matériel large, offrant un débit de chantier élevé. Je l'ai mis en œuvre sur certaines parcelles restées en agriculture conventionnelle. J'ai aussi bénéficié, par ailleurs, de l’aide à la conversion à l’agriculture biologique.
De nouveaux itinéraires culturaux pour réduire les pollutions
Mon projet n’en est qu’à ses débuts. J'ai supprimé l’apport de produits phytosanitaires sur les parcelles converties en bio. Les couverts d’inter-culture et l’association d’espèces me permettent de limiter l’enherbement et de mieux gérer la fertilisation azotée grâce aux légumineuses. Cette année le bilan technique est motivant : l'enherbement et les maladies ont été maîtrisés. Et cette récolte 2019 est aussi encourageante économiquement pour poursuivre dans ce système de production sans produits phytosanitaires.
Des investissements pour sécuriser l’exploitation
Actuellement 20% de la surface que je cultive est en bio. J'envisage d’en convertir davantage pour réduire l’utilisation d’intrants, sources de pollutions diffuses. Pour cela, je souhaite investir dans du matériel de triage et dans une écimeuse. Cela me permettra d’introduire dans les rotations des associations de cultures et de sécuriser l’itinéraire technique en cas d’échec du désherbage."