La rivière Lathan retrouve sa forme
Le syndicat mixte du bassin de l’Authion et de ses affluents restaure la rivière du Lathan à Linières-Bouton dans le Maine-et-Loire (49). Il redonne du relief à la rivière. Bénéfices : un fonctionnement plus naturel de la rivière, plus de biodiversité et une quantité d’eau plus importante en été.
Le Lathan, affluent de l’Authion, a été aménagé et à partir des années 1980 : son lit a été élargi et approfondi sur l'ensemble du linéaire et 38 ouvrages hydrauliques aménagés pour maintenir le niveau d'eau. Le cycle naturel de l’eau sur le bassin versant de l’Authion a aussi été fortement modifié par l’irrigation et le drainage des terres, l’imperméabilisation des sols aggravant les risques d’inondation dans les zones habitées. Conséquence : 85 % des cours d’eau du bassin de l’Authion subissent une dégradation de leur état due notamment au manque d’eau.
Méandre restauré sur le Lathan
février 2019
© Ralph Clarke, SMBAA
Restaurer le Lathan pour alimenter sa nappe d'accompagnement
Les premières études de restauration du Lathan portaient principalement sur la restauration morphologique du lit mineur (c’est-à-dire de sa forme) et de la continuité écologique (libre circulation des espèces (poissons,…) et des sédiments). Afin de concilier ces travaux avec les usages pratiqués sur le bassin, une étude de gestion quantitative sur les « volumes prélevables » a été conduite sur le bassin versant (nappes et rivières). Celle-ci a révélé notamment un lien fort entre le niveau du cours d’eau et celui de sa nappe d’accompagnement : quand la rivière est basse, la nappe est basse et quand elle déborde, elle recharge la nappe en eau.
Ainsi, la forte perméabilité des sols accentue la vulnérabilité des cours d’eau en période de basses eaux (étiage estival).
A la lumière de cette étude, la stratégie de restauration du cours d’eau est alors envisagée sous un autre angle : l’objectif est aussi de permettre à nouveau au Lathan de déborder pour recharger la nappe. Des matériaux (pierres, graviers…) seront déposés dans le lit du cours d’eau, pour permettre de rehausser les niveaux d’eau.
Les cours d’eau et leur nappe d’accompagnement : Les eaux d’infiltration pénètrent dans le sous-sol jusqu’à ce qu’elles rencontrent une couche géologique imperméable. Dans le sous-sol, l’eau occupe les vides présents dans toutes les roches sous forme de pores ou de fissures. Elle forme alors une nappe d’eau souterraine. L’alimentation de la nappe provoque naturellement la remontée de son niveau piézométrique pour reconstituer totalement ou partiellement les réserves régulatrices. Ces réserves se vidangent tout au long de l’année dans les cours d’eau qui drainent la nappe. Elles jouent un rôle de régulateur de leur débit. Elles assurent notamment l’essentiel de leur débit d’étiage en période estivale de basses eaux.
Cahier pédagogique n°4 "A la découverte des eaux souterraines" (page 10 : les nappes d’eau souterraines)
Un caractère plus naturel est redonné à la rivière sur environ 1,8 km par :
- l’écrasement des berges et la création de banquettes végétalisées pour diminuer la largeur du lit de 30 à 50 %. L’objectif est de créer des berges en pentes douces et dynamiser les écoulements,
- l’abaissement définitif de clapets hydrauliques pour rétablir la continuité écologique
- la rehausse du fond du lit par la création de 14 radiers de 40-70 cm de haut et la diversification des habitats (voir schéma ci-dessous).
Illustration d’un radier et de la diversification des écoulements par une coupe en travers du cours d’eau
Aux côtés du syndicat mixte du bassin de l’Authion et de ses affluents, d’autres partenaires ont contribué à la réussite de ce projet :
- la fédération de Maine-et-Loire pour la pêche et la protection du milieu aquatique
- l’agence de l'eau Loire-Bretagne
- le conseil régional des Pays de la Loire
- les propriétaires, exploitants riverains : agriculteurs, forestiers
- les entreprises de travaux
« Ce projet nous a montré qu’il est nécessaire de dépasser les craintes sur l'abaissement du niveau du cours d'eau (abaissement des clapets) pour rétablir la continuité écologique. Il a permis aussi de montrer des bénéfices du retour à un fonctionnement plus naturel du cours d'eau : une meilleure qualité de l’eau, une capacité plus grande à retenir l’eau pour recharger le niveau de la nappe, une biodiversité plus riche. »
Ralph Clarke, coordinateur milieux aquatiques et technicien de rivières au syndicat mixte du bassin de l’Authion et de ses affluents
La quantité et la qualité du cours d’eau en nette amélioration
Afin d’évaluer les bénéfices sur le cours d’eau et les nappes phréatiques sont réalisés :
- un suivi biologique (suivi des espèces animales et végétales présentes sur le site et de leur nombre)
- un suivi topographique annuel pour observer l’évolution des sédiments déposés dans la rivière
- un suivi des niveaux des nappes souterraines : 3 piézomètres installés à 50, 200 et 600 mètres du cours d'eau mesurent l'influence des travaux de renaturation sur le niveau de sa nappe d’accompagnement (alluviale). Le suivi sera poursuivi pendant 5 ans pour évaluer leur impact sur les autres nappes d’eaux souterraines et, en particulier celle du Cénomanien réservée en priorité pour l’eau potable.
En 2017, malgré des prélèvements d’eau importants et de faibles pluies automnales, une augmentation d’une vingtaine de centimètres du niveau de la nappe d’accompagnement du cours d’eau est observée.
Une amélioration significative de la qualité écologique du cours d’eau est observée.
Le chantier a montré son efficacité : usagers, riverains et élus sont satisfaits des résultats. Et le syndicat mixte du bassin de l’Authion et de ses affluents a lancé de nouveaux projets :
- restauration d'affluents et sources du Lathan,
- restauration du Lathan en aval du projet sur 10 kilomètres et création de zones d'expansion de crues,
- restauration de zones humides riveraines.
Pascal Boniou
© JL Aubert, Aelb
« Ce projet est une nouvelle approche originale de la restauration de cours d'eau avec la prise en compte des milieux aquatiques mais aussi des bénéfices sur la gestion quantitative et qualitative de la ressource, et sur la biodiversité. Il permet de mieux comprendre en quoi l'amélioration du fonctionnement des milieux aquatiques leur permet d’être plus résilients face aux effets du changement climatique (notamment le manque d’eau). Il a permis à la fois d’améliorer le fonctionnement et la biodiversité de la rivière et de mieux satisfaire les usages. Il répond ainsi aux objectifs fixés par le Sage de l’Authion et par le Sdage Loire-Bretagne de gestion globale de la ressource pour assurer la pérennité de tous les usages. »
Pascal Boniou, chargé d’interventions spécialisé (Projets de territoires - Biodiversité) à la délégation Maine-Loire-Océan (site du Mans), à l’agence de l’eau Loire-Bretagne
*Nappe d’accompagnement : nappe d'eau souterraine voisine d'un cours d'eau dont les propriétés hydrauliques sont très liées à celles du cours d'eau. Source : Glossaire eau & milieux aquatiques www.glossaire-eau.fr