A l'école du sol, réflexions en groupe pour moins d'herbicides
Fin 2017, un groupe d'agriculteurs volontaires des départements de Vendée (85) et des Deux-Sèvres (79) s'est constitué pour trois ans. L'association pour la promotion d'une agriculture durable (APAD) Centre-Atlantique accompagne ce groupe dit "groupe 30 000", à réduire l'usage d'herbicides en agriculture de conservation des sols.
Accompagner des groupes d’agriculteurs dits « groupes 30 000 » vers des pratiques qui réduisent l’usage des produits phytosanitaires et leur impact sur l’environnement, est une action prioritaire du plan Ecophyto 2+. L’objectif est d’accompagner 30 000 fermes d’ici 2021, par le financement et l'accompagnement de collectifs d’agriculteurs.
Réduire les herbicides tout en maintenant une couverture permanente du sol
Garder une couverture permanente des sols par la végétation, ne pas travailler le sol et augmenter la diversité des plantes cultivées sont les 3 piliers de l’agriculture de conservation des sols. Ce système de production est très économe en insecticides et fongicides grâce la biodiversité cultivée. L’objectif du groupe est de trouver des techniques permettant la réduction de l’usage des herbicides. Deux axes de travail : mettre en place des couverts végétaux adaptés, notamment en interculture, qui empêchent le développement des adventices, et intégrer de nouvelles cultures dans les rotations, afin de casser la dynamique des mauvaises herbes.
Des techniques testées chez chaque agriculteur, puis partagées
Chaque agriculteur du groupe teste une ou plusieurs techniques de couverts en interculture : espèces implantées, type d’implantation (avant, pendant ou après la moisson), modalités de destruction.
Le groupe se réunit régulièrement pour échanger sur les résultats obtenus par chacun. L’animateur conseille individuellement chaque agriculteur. Des échanges avec d’autres collectifs d’agriculteurs sont organisés : d'autres « groupes 30 000 » ou des agriculteurs accompagnés dans le cadre d’un contrat territorial avec l’agence de l’eau Loire-Bretagne.
En agriculture le pas de temps des expériences est annuel ! Les résultats des tests sont parfois positifs, d’autres fois décevants, mais toujours riches d’enseignements.
Une journée de partage dans le bassin de la Bultière
Différentes espéces de couverts testées en mélange
Sorgho, phacélie, colza
octobre 2019
© Agence de l'eau Loire-Bretagne
L'agriculteur Philippe Chupin réalise sur une parcelle de son exploitation, des essais sur des couverts estivaux pour comparer leur développement.
Diverses espèces sont implantées, seules ou en mélange : sorgho, moha, phacélie, colza, tournesol géant, tournesol 100 jours, maïs... Le semis est fait à la volée avant la moisson. Différents enrobages des graines sont testés. D’autres couverts sont implantés après la récolte, avec un semoir de semis direct.
Visite des couverts d'été
Visite des couverts d'été
octobre 2019
© T. Gain - APAD
Le 2 octobre 2019, pour échanger sur les techniques testées, une trentaine d’agriculteurs du groupe 30 000 de l’Apad, et des agriculteurs du bassin versant de la Bultière se retrouvent sur la parcelle.
C’est l’occasion pour Philippe Chupin de partager les résultats qui sont enrichis des expériences de chaque participant. Les échanges portent aussi sur :
- les techniques de destruction des couverts avec démonstration de lutilisation des rouleaux présentés par la coopérative d'utilisation de matériel agricole (Cuma),
- les enjeux de préservation de la qualité de l’eau rappelés par l’animateur du contrat territorial de la Bultière,
- les objectifs du plan Écophyto présentés par la chambre d’agriculture,
- la comparaison des cultures dérobées estivales faite par la coopérative Cavac.
Suivre la diminution des traitements
Pour suivre l’utilisation des produits phytosanitaires, un indicateur de suivi est utilisé, l’indice de fréquence de traitement (IFT). Celui des agriculteurs du groupe est plus bas que l’indice régional. Au sein du groupe, cet indice n’a pas particulièrement évolué. La gestion des herbicides en agriculture de conservation des sols est très complexe, surtout pour les céréaliers, qui ne peuvent permettre un développement trop important des adventices. Et le développement des couverts limitant le développement d’adventices est tributaire du climat.
Pour le glyphosate, l'objectif est de baisser en moyenne son utilisation à un litre par hectare à l’issue des 3 ans. Une diminution en bonne voie au sein du groupe : de 2 L/Ha initialement, elle est passée à 1.5L/Ha en moyenne avec des éleveurs qui sont arrivés à 0.95 litre.
Travailler sur l'allongement des rotations
L’animateur travaille aussi sur l’allongement des rotations, 3ème levier de lagriculture de conservation des sols. Les cultures envisagées sont le lin, les pois chiches, la lentille, le sarrasin. Des résultats positifs sont obtenus mais il faut trouver une valorisation économique des productions avec des débouchés et des prix assurés !
« L’intérêt de cette action est la dynamique de groupe. Il y a peu d’information descendante. L’objectif est de permettre de nombreux échanges entre les agriculteurs pour leur permettre d’avancer plus vite, en profitant des expériences de chacun.
Pour cet accompagnement, nous bénéficions d'une aide de 34 200 euros de l'agence de l'eau Loire-Bretagne, soit 60 % du coût total. Les 40 % restant sont financés par l’association, par les agriculteurs eux-mêmes et par le fonds d'assurance formation Vivéa. L'association s'investit dans ce réseau car il est essentiel pour mobiliser, préserver l'eau et l'environnement, avec des exploitations économiquement performantes. »
Thierry Gain, animateur groupe 30 000 « Moins d’herbicide en agriculture de conservation des sols » - APAD Centre-Atlantique